mercredi 25 janvier 2012

né un 27 janvier : Lewis Carroll,

1832 : Lewis Carroll, écrivain, photographe et mathématicien britannique. († 14 janvier 1898).


Lewis Carroll (de son vrai nom Charles Lutwidge Dodgson) est un romancier, essayiste, photographe et mathématicien britannique né le 27 janvier 1832 à Daresbury, dans le Cheshire et mort le 14 janvier 1898 à Guildford.












 Professeur de mathématiques à Christ Church College à Oxford, il fut ordonné diacre de l'Église anglicane en 1861 mais ne devint jamais prêtre par la suite1. Il publia sous son vrai nom des ouvrages d'algèbre et de logique mathématique ainsi que des recueils d'énigmes et jeux verbaux. Il fut toute sa vie attiré par le charme des petites filles etLes Aventures d'Alice au pays des merveilles (1865) fut à l'origine écrit pour amuser Alice Liddell et ses deux sœurs, filles du doyen de Christ Church. La suite des aventures d'Alice, De l'autre côté du miroir parut en 1872, et La Chasse au Snark, long poème parodique, en 1876. Les illustrations de John Tenniel sont depuis indissociables du texte. L’œuvre de Carroll dérange par sa logique absurde, apparemment irréfutable, sous laquelle la cruauté affleure sans cesse. Derrière le conte pour enfants transparaît la vision très féroce d'une société victorienne triomphante dont les codes et les rites sont implacablement débusqués.
Critiques et philosophes trouveront encore longtemps des énigmes à interpréter dans les jeux de langage qui par certains aspects annoncent toutes les ambiguïtés sémantiques de la littérature moderne.

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Bibliographie

rongés / tentation de lire...



 Les aventures d'Alice au pays des merveilles


Le temps du chef-d’œuvre, ce fut « au cœur d’un été tout en or », la journée du 4 juillet 1862. Alice, alors âgée de dix ans, fut l’inspiration de Charles Dodgson. Il la courtisait au moyen de devinettes ou de belles histoires composées à son usage.
L’histoire qu’il racontait par-dessus son épaule à Alice, assise derrière lui dans le canot, fut improvisée avec brio tout en maniant l’aviron. Lorsque la fille lui demanda d’écrire pour elle son histoire, il accomplit son chef-d’œuvre : un manuscrit des « Aventures d’Alice sous terre », précieusement calligraphié et illustré. Il l’offrira à son inspiratrice, Alice Liddell, le 26 novembre 1864.
En 1864, une ombre s'abat sur ses relations avec Mrs. Liddell qui lui refuse la permission d'inviter ses filles.
Charles Dodgson rédigera une deuxième version, Les Aventures d'Alice au pays des merveilles, destinée à une publication en librairie. Il se rendra à Londres en janvier 1865 pour convaincre John Tenniel de créer les illustrations d’Alice. Leur collaboration ne sera pas sans accrocs : aucun détail n’échappera à la minutieuse critique de Charles Dodgson. Il dédicacera les premiers exemplaires pour des amis en juillet 1865. Le succès sera immédiat.
Au Noël 1888, il commencera une troisième version Alice racontée aux petits enfants. Les premiers exemplaires seront distribués à la fin de 1889.
En écrivant Alice, Lewis Carroll s’est placé sous le signe de la féerie mais il n’en conserve que l’apparence. Point de fées mais les personnages de l’univers merveilleux : roi, reine, nain, sorcière, messager, animaux doués d’un comportement et d’un langage humain. À une pléiade de personnages insolites s’ajoutent les pièces d’un jeu d’échecs, des cartes à jouer vivantes. Clin d’œil à ses lecteurs, des personnages charmants empruntés aux nursery rhymes de son enfance : Humpty-Dumpty, les jumeaux Tweedledum et Tweedledee.
Si Lewis Carroll s’inscrit dans une tradition, c’est pour la plier à son inspiration : jeux verbaux, chansons, devinettes jalonnent le récit. À maints égards son œuvre est étonnamment audacieuse. Les personnages ne semblent pas accepter les métamorphoses répondant à une saine logique - comme celle de la citrouille devenant carrosse - et cherchent au contraire à y échapper. La parodie est l’une des clés qui ouvre au lecteur l’univers d’Alice.
Les personnages font en quelque sorte le contraire de ce qu’on attend d’eux. C’est l’inversion, une seconde clé du pays des merveilles. La troisième clé est le nonsense, un genre que Lewis Carroll manipule avec génie. Le nonsense feint de laisser espérer au lecteur une explication logique puis traîtreusement trompe ses habitudes de pensée.
«  Je lui en donne une : ils m’en donnèrent deux,
Vous, vous nous en donnâtes trois ou davantage ;
Mais toutes cependant leur revinrent, à eux,
Bien qu’on ne pût contester l’équité du partage. »
Alice au pays des merveilles, déposition du lapin blanc au procès du valet de cœur.
Alice est en porte à faux dans le pays des merveilles comme Charles Dodgson l’était dans la réalité. Elle fait tout à rebours ou à contretemps de ce qui est convenable sur un plan social. Elle est toujours trop grande ou trop petite et a conscience de son inadaptation. La reine blanche l’accuse carrément de vivre à l’envers et lui conseille d’apprendre à croire à l’impossible. Mais au contraire de Charles Dodgson qui subissait la réalité, Alice ose se rebeller contre celui de l’anormalité. Elle est hardie et sereine, la projection idéalisée de son auteur.
Beaucoup des animaux de l'histoire représentent des personnes réelles, ainsi :
Dinah est le nom de la chatte d'Alice Liddell et de l'Alice de Carroll
le Canard évoque un ami de l'auteur, le révérend Duckworth (duck signifie canard en anglais)
le Dodo (ou le Dronte) évoque l'auteur lui-même (à cause de son bégaiement, quand il se présentait, il disait : "Do-Do-Dodgson")
le Lori (petit perroquet malais) évoque Lorina Liddell, sœur d'Alice
l'Aiglon évoque l'autre sœur, Edith

Alice de l'autre côté du miroir
de l'autre côté du miroir et ce qu'Alice y trouva

Bayan Hawari le roi par les aventures d’une petite fille qui a réussi à traverser un miroir. Cet objet mystérieux qu’est le miroir a toujours été lié à la magie et joue un rôle assez inquiétant dans les contes. C’est l’image d’une parfaite justesse pour figurer la ligne de démarcation entre les mondes extérieur et intérieur.
Tout comme Alice au pays des merveillesDe l’autre côté du miroir est sinon un pur récit de rêve, du moins une histoire fantastique dont l’atmosphère est intensément onirique. D’autres avant lui avaient confondu dans leurs œuvres l’imaginaire et le réel, mais Lewis Carroll a le mérite d’avoir créé un mélange original d’onirisme et de logique.
« Il a ouvert la voie à un genre littéraire absolument nouveau, dans lequel les faits psychologiques sont traités comme des faits objectifs… Le non-existant, les animaux qui parlent, les êtres humains dans des situations impossibles, tout est considéré comme admis et le rêve n’est pas troublé », dit Florence Becker Lennon.
Le volume paru en 1871 rencontra lui aussi un immense succès. Les compliments eussent suffi à tourner une tête moins solide. Toutefois, Lewis Carroll écrivit à un correspondant : « Je ne lis jamais rien sur moi-même, ni sur mes livres ».

Il serait peut-être excessif de parler d’influence entre Lewis Carroll et les représentants de tel ou tel mouvement littéraire contemporain. Mais il n’est pas impossible qu’Alfred Jarry ait pensé à Humpty-Dumpty lorsqu’il imagina son Ubu. Constamment employé à des fins poétiques, le calembour peut également avoir joué un rôle primordial dans l’élaboration de l’œuvre de Raymond Roussel.
L’invention carrollienne des « mots-valises » a été exploitée à outrance par James Joyce dans Ulysse ou Finnegan’s Wake. Ce dernier a quelque peu compliqué le jeu en empruntant ses vocables à différentes langues.
Le nonsense aura aussi été l’un des grands ressorts de la poésie dadaïste et surréaliste. L’admirable Grand Jeu de Benjamin Péret, une merveille de l’absurde poétique, est l’un des chefs-d’œuvre de l’époque du surréalisme.

En 1876 paraît La Chasse au Snark qui est l’une des meilleures réussites en vers de Lewis Carroll et l’une de ses œuvres capitales. Les lecteurs voulurent y voir une allégorie, certains de la popularité et d’autres du bonheur, mais il soutint toujours n’avoir voulu y donner aucun sens particulier : « Quant à la signification du Snark, j’ai bien peur de n’avoir voulu dire que des inepties ! », écrivait-il à un ami américain. « Toutefois, voyez-vous, les mots ne signifient pas seulement ce que nous avons l’intention d’exprimer quand nous les employons… Ainsi, toute signification satisfaisante que l’on peut trouver dans mon livre, je l’accepte avec joie comme étant la signification de celui-ci. La meilleure que l’on m’ait donnée est due à une dame … qui affirme que le poème est une allégorie représentant la recherche du bonheur. Je pense que cela tient admirablement à bien des égards – en particulier pour ce qui concerne les cabines de bains : quand les gens sont las de la vie et ne peuvent trouver le bonheur ni dans les villes ni dans les livres, alors ils se ruent vers les plages, afin de voir ce que les cabines de bains pourront faire pour eux ».

Lewis Carroll déclara avoir composé La Chasse au Snark en commençant par le dernier vers qui lui vint à l’esprit lors d’une promenade et en remontant vers le début du poème qui se constitua pièce par pièce au cours des deux années suivantes.
Un thème qui frappe, c’est celui de l’oubli, de la perte du nom et de l’identité. Le personnage du boulanger a oublié sur la grève quarante-deux malles, marquées à son nom, qu’il a également oublié. Lorsqu’il se met à raconter sa triste histoire, l’impatience du capitaine, qui craint une trop longue confidence, l’incite à sauter quarante ans. Ces chiffres évoquent l’âge de Charles Dodgson à cette période.

En dépit du souffle de fantaisie désopilante qui le parcourt d’un bout à l’autre, La Chasse au Snark n’est pas un poème gai. La quête qu’il relate, en fin de compte, tourne mal. L’anéantissement du boulanger, à l’instant de sa rencontre avec le terrible Boujeum, invisible aux autres personnages, laisse une impression de malaise. Rapprochant le poème des premières comédies de Charlie Chaplin, on y voit « une tragédie de la frustration et de l’échec. »
Il y a incontestablement une part de satire sociale dans l’absurde procès du Rêve de l’avocat qui ressemble beaucoup à une parodie de procès réel.

Dans la préface de Sylvie et Bruno, publié 1889, chef-d’œuvre qui témoigne d’une technique entièrement renouvelée par rapport à Alice, Lewis Carroll proclame son désir d’ouvrir une nouvelle voie littéraire.

L’audace est grande pour l’époque de la construction de deux intrigues, le rêve constamment accolé à la réalité. L’objectif essentiel du narrateur est de franchir le mur de la réalité pour atteindre le royaume du rêve : il voit l’un des personnages de son rêve pénétrer dans la vie réelle. Lewis Carroll crée l’effet de duplication de ses personnages.
L’intérêt réside également dans la juxtaposition des deux intrigues. L’originalité de Lewis Carroll ne consiste pas à unifier rêve et réalité mais à reconstituer une unité à partir de la multiplicité initiale.
Dans sa préface, ce qu’il nous dit de la construction de son livre : un noyau qui grossit peu à peu, une énorme masse de « litiérature » (litter, ordure) fort peu maniable, un agrégat d’écrits fragmentaires dont rien ne dit qu’ils formeront jamais un tout. Le roman n’est plus cette totalité harmonieuse où s’exprime le souffle de l’inspiration. Le fini romanesque est démystifié d’une façon ironique et pour tout dire sacrilège pour l’époque victorienne.
Ce texte sera sa dernière création.

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2 commentaires:

  1. Un auteur adepte de l'ésotérisme également. Mais j'ai bien aimé lire "Alice".

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    1. pas fan, mais peut-être que je lirais autre chose... vas savoir ce qui peut me tomber sous la main au cours d'une brocante,
      bises Alex

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